On a souvent tendance dans nos articles à seulement parler de la destination finale de nos explorations. Il faut dire que ceux-ci sont déjà assez longs. Oui, oui je te vois derrière ton écran, soupirer et lever les yeux au ciel devant les pavés de texte que tu dois lire à chaque article. On doit t’avouer qu’on n’a pas encore trouvé de solution pour raconter nos voyages seulement avec de belles photos ou vidéos. D’autant, qu’il est facile de tronquer la réalité d’un paysage. Combien de photos voit-on fleurir sur instagram d’un lieu qui semble totalement sauvage, sauf qu’en réalité des centaines de touristes sont cachés derrière l’image. Bref, on s’égare….
Tout ça pour te dire, qu’on passe trop souvent sous silence une bonne partie de nos voyages : les trajets pour arriver à destination. C’est pourtant une partie importante de nos aventures. Pour ne pas dire ce qui lui donne souvent une saveur si particulière. Alors aujourd’hui, on va essayer de combler cet oubli en t’emmenant dans les coulisses de nos déplacements en Indonésie.
Après deux semaines passées sur l’île de Bali, une furieuse envie d’aller voir ailleurs pointe le bout de son nez. La difficulté de se déplacer conjuguée à l’effervescence et au bruit incessant finit par peser sur notre moral. Avec notre extension de visa enfin en poche, on décide de prendre la poudre d’escampette, direction Lombok et plus précisément le village de Sembalun Lawang. On espère y trouver un peu plus d’authenticité qu’à Bali. Et puis surtout, on succombe à l’appel de la nature et à l’ascension du mont Rinjani qui nous fait de l’œil !
Les transports à l’indonésienne…
Avant de profiter de Lombok, encore faut-il y arriver. Au départ, dans notre ignorance, on pensait tout bêtement qu’il nous suffirait de prendre un des bateaux qui relient les deux îles comme la plupart des voyageurs nous ayant précédés. Mais, il était écrit que rien ne serait simple en Indonésie. Le choix qui s’offrait à nous était un « poil » plus compliqué. En résumé, cela consisterait à se rendre à pied ou en Taxi à Sanur, puis prendre un bus Perama pour rejoindre Padangbai. Depuis Padangbai, il faudrait ensuite se rendre au port pour prendre le bateau public à destination de Lembar. Et, une fois arrivés, il faudrait encore prendre un taxi pour rejoindre Mataram. De là, il semblerait qu’un bemo puisse nous transporter jusqu’à Aikmel, d’où il faudrait encore nous débrouiller pour trouver un autre transport pour atteindre notre destination finale. Comme on dit, il n’y a plus qu’à… Facile non?
Honnêtement, on n’était pas vraiment emballé par cette solution. En plus, le comble c’est que son prix était loin d’être bon marché à cause des taxis à prendre au départ et à l’arrivée. Heureusement, à force de recherche, on se rend compte qu’il existe des vols low-cost entre Bali et Lombok. Cette solution à l’avantage d’être bien plus simple à organiser, plus sûre et rapide. Le seul bémol, c’est que ce n’est pas très écologique. Mais, fatigué par nos expériences sur Bali, on décide à contrecœur de partir pour cette option.
On choisit donc la compagnie Lion Air après avoir pris soin de vérifier que celle-ci ne figure pas sur la liste noire des compagnies aériennes. En effet, beaucoup de compagnies aériennes indonésiennes figurent sur cette liste internationale en raison de défaillance de sécurité. On a qu’une vie, alors si on pouvait éviter de la perdre pour quelques euros c’est mieux. Le vol dure seulement 30 minutes par rapport au 2-3 jours que nous aurait pris l’autre solution. C’est imbattable et le plus paradoxal, c’est que le trajet en avion revient moins cher ! En plus, une fois arrivé à l’aéroport de Lombok, il nous suffit de prendre un bus public de la compagnie Damri pour rejoindre le terminal de bus proche du centre-ville de Mataram. De là, une petite marche à pied de 1.5 km (avec tout notre attirail sur le dos) nous permet de rejoindre la chambre qu’on a réservée dans un petit hôtel tenu par des locaux.
Mataram : une ville bien loin des complexes touristiques de Bali
Au bout de quelques minutes de marche dans les rues, on s’aperçoit vite que Lombok n’est pas Bali. La pauvreté est ici encore plus évidente. Alors, on détonne un peu dans cet environnement avec nos grands sacs sur le dos et notre peau blanche ! L’avantage c’est qu’aucun taxi ne vient nous solliciter de tout le trajet. Et ça, ça fait un bien fou! On n’est pas mécontent d’arriver à l’hôtel. Car les 1,5 km de marche se révèle vite physique avec la chaleur et nos 15 – 20kg respectifs sur le dos. D’ailleurs, on s’amuse de voir la réaction de nos hôtes à notre arrivée lorsque ceux-ci réalisent qu’on est venu à pied. Oui oui, des touristes blancs qui veulent marcher ça existe! En voyant les gouttes de sueur déferler de nos fronts, ils sont alors d’une gentillesse touchante en nous proposant des verres d’eau.
Une fois qu’on a pris possession des lieux et malgré la fatigue de la journée, on se motive pour sortir dehors et tenter de trouver de quoi manger. Il n’est pas très tard et pourtant après avoir tourné dans tout le quartier, on ne voit aucun warung ou quelque chose qui s’en rapproche. On doit donc se replier à l’hôtel sur une soupe de nouilles qu’on avait dans nos affaires. Tout juste de quoi remplir nos estomacs…
Du coup, le lendemain, histoire de ne pas revivre la même situation, on se rend à pied à un centre commercial qu’on a repéré sur l’application Maps.Me. En chemin, on a un peu l’impression (fondée ou non) d’attirer tous les regards. Ce n’est clairement pas ici qu’on va croiser des cars de touristes ! Enfin, tu me diras c’est un peu l’authenticité qu’on était venu chercher !
À notre arrivée, on se rend vite compte qu’il s’agit DU centre commercial de la ville. Il attire les Indonésiens fortunés du coin. Pour nous, c’est un centre commercial comme on peut en trouver partout en Europe, mais pour l’indonésien moyen il contient vraiment des magasins de luxe. On y trouve de quoi faire plusieurs repas et quelques encas pour nos 3-4 jours de trek autour du Rinjani. Et puis, l’avantage de ne pas être dans un coin touristique, c’est qu’on peut même se permettre de manger dans un restaurant un peu plus classe de la zone. Il faut dire, qu’on y mange pour 3 fois moins chers qu’à Bali !
On profite aussi de cette journée de transition à Mataram pour faire un repérage au terminal de Mandalika. On prévoit d’y prendre le bemo (mini bus local) jusqu’à Aikmel, puis de trouver un autre transport pour Sembalun. Mais, une fois le minibus trouvé, on galère tout bêtement à faire comprendre qu’on ne veut partir que le lendemain, car personne ne parle un mot d’anglais ici bien sûr!
Trajet à Sembalun : toute une aventure !
Le lendemain à 9h, nous voilà chargés de nos sacs sur le dos pour rallier de nouveau le terminal de Mandalika. Il y a seulement quelques kilomètres à parcourir, mais avec le poids de nos sacs, le trajet n’est clairement pas une partie de plaisir. On mettra une bonne heure à atteindre le terminal. Mais, ce matin la chance semble nous sourire, car un homme va directement à Sembalun en pick-up ! Son fils nous aborde et fait l’intermédiaire. On se met rapidement d’accord sur un prix de 100.000 roupies pour 2 personnes. Pour plus de 80km de route, il n’y a rien à dire ! Il nous dirige alors dans un stand tenu par sa famille pour nous faire patienter.
En attendant, on décide de manger un morceau en commandant un plat cuisiné par la dame du stand. Puis, la discussion s’initie difficilement avec les quelques mots qu’on connaît en Indonésien et eux en anglais. Le conducteur essaie de nous proposer une chambre d’hôtel à Sembalun. Ça tombe bien, on n’a rien réservé, car on ne savait pas combien de temps on mettrait pour arriver sur place. On demande donc le prix avec un des seuls mots qu’on baragouine en indonésien : “Berapa ?” (Traduction : combien ça coûte ?). En réponse, on comprend : 350.000 roupies. Ah ben non, cela ne va pas le faire, c’est trop cher.
L’erreur qu’on fait dans la discussion, c’est de dire qu’on veut faire le Rinjani ! C’est LE mot magique à ne pas prononcer ! Après ça, il nous propose de nous amener à Sembalun, ce qui était déjà convenu, pour 150.000 roupies cette fois ! La seule différence c’est qu’il ne s’arrêterait pas à Aikmel. Mais, on refuse, car il nous est bien égal d’attendre un peu tant qu’on arrive à destination. On apprécie moyennement ce changement de position de dernière minute, alors que le bus alternatif pour Aikmel est déjà parti ! On commence même à se demander si on a fait le bon choix.
Mais, quelques minutes plus tard, le dernier passager qu’on attendait arrive enfin. Il s’installe avec nos sacs à l’arrière du pick-up, tandis qu’on monte à l’avant. Après 2 heures d’attente, on n’est pas mécontent de partir. L’ambiance pendant le trajet est même plutôt sympa. Le chauffeur est souriant, il chante et nous montre avec ses mains que le trajet va faire les montagnes russes jusqu’à Sembalun.
Arrivé à Aikmel, on s’arrête comme prévu sans doute pour prendre quelques passagers supplémentaires. En attendant à l’extérieur du pick-up, on fait la rencontre d’un homme qui se dit guide et qui a un anglais correct. Au fil de la discussion, on pose des questions sur les treks et les prix pratiqués, sans dire pour autant qu’on compte faire celui du Rinjani (on ne se fera pas avoir 2 fois !). Plusieurs femmes se joignent à nous pour le trajet et s’installent à l’arrière du pick-up. Il est temps pour nous de partir. Au cas où, on prend donc le numéro du guide et on remonte. On constate alors avec surprise qu’il enfourche son scooter et se met à nous suivre ! Euh, mais pourquoi… ?
L’île de Lombok est réputée plus sauvage que Bali. On est quand même surpris de voir autant d’habitations tout le long de la route. On ne doit pas avoir la même définition du mot sauvage. La fin du trajet est épique au milieu de la jungle sur une route qui fait les montagnes russes pour atteindre un col à 1500m. Ici, le panorama se dévoile. On se retrouve face aux montagnes recouvertes par la végétation tropicale et on voit en contrebas une immense vallée où se trouve le village de Sembalun. Au final, on aura mis plus de 3h pour rallier Sembalun depuis Mataram. Le seul inconfort aura été notre siège presque brûlant à cause du moteur qui chauffait sous nos fesses !
Organisation du trek du Rinjani
Une fois arrivé à Sembalun, le pick-up nous dépose directement devant l’hôtel. On pense alors se poser tranquillement et profiter de l’endroit. Mais, c’était sans compter sur le guide. Oui tu sais, le fameux guide qui nous suivait sur son scooter depuis Aikmel. Eh bien, il est toujours là ! D’ailleurs, il se gare dans la cour de la guesthouse. Franchement sur le coup, on hallucine un peu…
Comme on est venu sur Lombok avec l’idée de faire le trek du Rinjani, on étudie une carte du parcours affichée sur l’un des murs de la guesthouse. Le guide reste là à nous surveiller et nous colle à la semelle. Comme officiellement il est obligatoire d’avoir un guide pour faire l’ascension du Rinjani pour des questions de sécurité (ou de gros sous…à choisir…), on décide de définir avec lui un itinéraire et estime le nombre de jours dont on a besoin avant de se mettre d’accord sur un prix. On ne suit pas les itinéraires classiques, car on souhaite en priorité aller sur la rive opposée de Senaru pour y être au lever du soleil. On verra après si on fait le sommet en fonction de la météo. Mais, comme l’ascension au lever de soleil est le truc touristique survendu par les tours, on est plutôt d’avis de passer notre chemin.
On se heurte à un problème inattendu lors de la discussion. On veut utiliser notre réchaud à essence, alors que lui veut prendre un réchaud à gaz et qu’on achète des bouteilles de gaz. On refuse, car l’essence est beaucoup moins chère, et surtout cela ne génère aucun déchet. Et Dieu sait ce que les déchets deviennent sur le volcan… Il revient à la charge plusieurs fois comme s’il ne nous faisait pas confiance de savoir faire fonctionner notre réchaud. Euh, t’es gentil coco, mais on a randonné pendant 5 mois en Nouvelle-Zélande sans ton aide et jusqu’à preuve du contraire, on est toujours en vie!
Après ces quelques incompréhensions, on se donne rendez-vous 2 jours plus tard. Car avant, pour s’échauffer, on veut bivouaquer au sommet du Gunung Pergasingan. Là-dessus, on se replie dans notre chambre, car on ne supporte plus d’être suivi à la semelle…
Rencontre inattendue
Pour le repas du soir, on décide de profiter du restaurant de la guesthouse. Bien nous en prend, car on se régale avec deux plats de riz frits cuisinés avec les légumes frais du jardin. Tout simplement, un des meilleurs de notre voyage ! Au cours du repas, on fait la connaissance d’un groupe de deux Balinais un peu hors du commun en charmante compagnie. L’un d’eux a vécu en France et connaît donc un peu la langue. L’autre a vécu en Australie et parle très bien anglais. Ils sont revenus vivre en Indonésie et voyagent actuellement en moto.
Le père d’un des deux était un des meilleurs danseurs balinais dans les années 30, tandis que l’autre s’est attaché à le faire connaître au niveau international. Ce sont des bons vivants avec qui on a pu avoir de longues et vraies discussions. C’est la première fois depuis 2 semaines qu’on peut enfin discuter avec des Balinais qui ne sont pas intéressés par notre argent et qui en plus ont un certain recul sur leur pays. Cela fait un bien fou !
Changement de plan quand tu nous tiens !
Deux jours plus tard, de retour du Gunung Pergasingan (retrouve notre récit ICI) notre pot de colle guide pour l’ascension du Rinjani vient à notre rencontre. Pendant notre absence, il a rencontré deux autres voyageuses qui souhaitent également faire l’ascension du Rinjani. Il s’est mis d’accord avec elles pour un certain itinéraire et pour un prix bien plus intéressant que le nôtre (et complètement farfelu au passage…enfin bref…). Ils partiraient seulement à 9h, ce qui est beaucoup trop tard pour notre plan. On risquerait de finir de nuit sur la crête du volcan, ce qu’on estime imprudent.
Le guide est presque gêné par la situation. Pour nous, c’est l’occasion idéale de se passer de lui et de faire le trek en autonomie totale sans guide ni porteur. Un défi comme on les aime ! On te garde le récit de cette épopée pour un prochain article.
En résumé, le plus important, ce n’est souvent pas la destination, mais les mésaventures et les souvenirs que l’on crée le long du chemin.
Ah oui alors ça on s’en est bien rendu compte à Sulawési : les transports c’est souvent long, parfois au petit bonheur la chance et ça se passe rarement comme prévu !
Chouette article ( et pauvre Lombok :'( )
Salut Aurore, c’est finalement ce qui fait en partie le charme de ce genre de destination :-). En ce moment, on pense beaucoup à l’Indonésie surtout avec ce qui est arrivé à Lombok et à Sulawesi. Ils n’ont vraiment pas de chance !
PS : Merci pour le compliment 🙂